• Gilda de Charles Vidor 1946

    Bande d'annonce:

    8/10

    Synopsis via Wikipédia:

    Johnny Farrell, joueur professionnel, débarque à Buenos Aires, en Argentine. Il se lie d'amitié avec Ballin Mundson, le propriétaire d'un casino, dont il devient l'associé. À l'issue d'un voyage d'affaires, Ballin revient, accompagné de celle qu'il vient d'épouser : l'extraordinaire Gilda. Le hasard, la prédestination, veulent qu'elle soit précisément l'ex-fiancée de Farrell. Ballin, suspectant l'ancienne liaison, confie à Farrell la garde de Gilda. L'ancien amour renaît de ses cendres. Farrell, en proie à la haine, la jalousie, subit l'inversion de sa passion amoureuse. Ballin, quant à lui, assoiffé de pouvoir, prépare l'organisation d'un trust international visant le monopole mondial du commerce d'un métal rare : le tungstène. Il réunit autour de lui un cartel d'hommes d'affaires, organisation secrète dont il est le chef.

    L'amour cependant, la passion qui le lie à Gilda, lui fait commettre les erreurs qui ruinent son plan. Gilda, devenue la veuve de Ballin, épouse Farrell en secondes noces. Ce dernier prend la succession de Ballin à la tête du cartel du tungstène. Il accuse Gilda d'infidélité, et lui reproche de ne pas respecter la mémoire de son défunt mari. Gilda relève le défi de Farrell. Elle provoque Farrell et démontre à tous qu'elle est effectivement cette épouse infidèle qu'il a lui-même épousée. Coup de théâtre, Ballin, que l'on croyait mort, resurgit… Il compte bien reprendre Gilda, et menace d'éliminer Farrell. Ballin est tué in extremis par Oncle Pio, l'employé-philosophe du casino et ange-gardien de Gilda.

    Gilda, un film noir et esthétique comme on n'en fait plus, riche de part ses plans contrastés et la finesse de ses dialogues.Dialogues composés de formules gracieuses au langage soutenu et souvent sarcastiques.

    Gilda de Charles Vidor 1946

    La présence du sympathique employé philosophe donne un peu de fantaisie à ce film sombre. C'est un peu l'ange gardien de Gilda, on ricane à ses remarques culottées faites à Farell qu'il qualifie de paysan, et à son côté babillard, curieux de tout, excédant le bras droit de Mundson. Ce petit phraseur et ses dictons donnent au film un humour certes convenu mais efficace.

    Gilda de Charles Vidor 1946

    Ce film est également ponctué de musiques entrainantes, avec notamment des chansons chantées par une Gilda à la voix suave et au regard désabusé. Plus mélancolique que la scène ou la belle se trémousse, celle ou elle chante "Put The blame on mame" en jouant de la guitare illustre bien un énième moment d'abandon et de tristesse.

    L'érotisme suggéré correspondant très bien à l'époque fait partie intégrante du charme et du mystère de ce film. Les tourments des personnages prennent place dans deux lieux à l'ambiance symbolique, une demeure à la préciosité austère et un casino, lieu ou règne l'argent, les coups de poker, les faux semblants. Les analyses en voix off de Johnny donnent beaucoup de profondeur à l'intrigue, il faut avouer que c'est une idée très moderne pour l'époque. Ce film traite de toute la complexité des rapports amoureux à travers le désir trop peu comblé d'une femme malmenée par les hommes. Une femme que Mundson tente de posséder intégralement pour s'en faire aimer en lui offrant luxe et dorures, mais qui se laisse emporter par son tempérament fulgurant et superstitieux. Un tempérament et un fatalisme qu'elle semble partager avec Farell qui dira lui même qu'il ne peut s’empêcher d'aller tout droit vers son destin. Deux personnages étrangement semblables, qui se détestent surement eux même avant de se haïr l'un l'autre.

    Gilda est victime de la possessivité et de l'impassibilité terrible de ceux qui l'entourent. Pour Farell Gilda est une une bombe à retardement, une créature dangereusement gourmande, avide de plaisir, prête à sacrifier tout et surtout tout le monde pour son désir. Son apparition se fait tardive et troublante, sous le regard d'un Johnny Farell plus que confus, comme pour mieux annoncer le désastre:

    Gilda et les hommes, en bonne séductrice, celle-ci veut régner dans un monde masculin, mais malheureusement pour elle, c'est bel et bien les hommes qui ont le pouvoir de mort:

    Gilda de Charles Vidor 1946

    Ce sont eux qui le plus souvent, d'un regard ou d'une phrase blessante, peuvent tourmenter une femme au point de lui faire faire des insomnies.

    Gilda de Charles Vidor 1946

    On ne peut trouver mieux que cette scène mythique pour mettre en lumière cette histoire d'amour-haine. Scène explosive qui marque ce jeu dangereux et sans fin ou les personnages se cherchent et se perdent:

    La misogynie est un des thèmes principaux de ce film ou le personnage féminin se fait pathétique, cherchant désespérément tendresse et attention. Ce qui ne peux également pas nous échappé, c'est l’ambiguïté de l'amitié entre Ballin et Farell. Comme Farell le dit lui même à Ballin, il naît en le rencontrant, pire encore que de s’aliéner, c'est une façon de se donner entièrement jusqu’à s'en oublier. Un thème se rajoute donc encore à se film, plutôt sulfureux pour l'époque, celui de l'homosexualité masculine. Le trio est ainsi explosif et complexe, on a d'ailleurs tendance à se perdre dans les sentiments des personnages, d’où la difficulté à les interpréter. Le mépris de Johnny pousse à bout Gilda, ainsi les deux rentrent dans cet engrenage engendré par la frustration et la colère. Glenn Ford incarne avec talent cet homme obsessionnel et cynique qui tente maladroitement de tout contrôler, réprimant sans relâche des désirs latents. George Macready, alias Ballin Mundson, est d'une élégance naturelle et fascinante. L'acteur à saisit toute la froideur et l'énigme de son personnage d'une rigueur presque obséquieuse.

    Gilda de Charles Vidor 1946

    Gilda de Charles Vidor 1946  

    Gilda de Charles Vidor 1946

     Certains voient en cette canne un symbole phallique, à vous de voir. 

    Gilda de Charles Vidor 1946

     

    Gilda de Charles Vidor 1946

     

    Gilda de Charles Vidor 1946

     Bien que le casting soit excellent, c'est sur Rita Hayworth que la grande majorité de notre attention se concentre. Ce film est celui qui a aux yeux du public fait de Hayworth LA femme fatale. Une Rita Hayworth qui à son corps défendant à revêtit une dimension singulièrement obscure. Elle deviendra la Pin Up fétiche des soldats américains, qui iront jusqu’à baptiser "Gilda" une bombe atomique larguée sur l'atoll de Bikini, ce qui horrifiera au plus haut point l’actrice. Un personnage qui semble prémonitoire et qui lui a tellement collé à la peau qu'elle aura tout au long de sa carrière du mal à en sortir. Gilda est la beauté dans tout son excès, trop de minauderies, de maquillage, une féminité exacerbée et irrésistible. Ce rajoute a tout cela une voix au débit rapide et au ton enjoué. Le petit plus de Rita c'est aussi un sourire de petite fille qui contraste avec une sensualité envoûtante de maturité. Ses tenues sophistiquées mettent en valeur son corps sculpturale et participent ainsi à sa légende. Gilda nous séduit en usant du charme de l'intelligence, de la méchanceté et de la beauté. Mais si Gilda se cache souvent derrière des manières bien farouches, on ne se fait pas de doute sur son bon fond. Capricieuse et furieusement provocante certes, mais pas dépourvue d'une âme chaleureuse.

     Ma tenue préférée portée par Gilda:

    Gilda de Charles Vidor 1946

    L'élégance de Gilda en images:

    Gilda de Charles Vidor 1946

    Gilda de Charles Vidor 1946

    Gilda de Charles Vidor 1946

    Gilda de Charles Vidor 1946

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    Gilda de Charles Vidor 1946

    Magnifique dans cette veste qui plus est:

    Gilda de Charles Vidor 1946

    Gilda de Charles Vidor 1946

    Gilda de Charles Vidor 1946

     La suite du film prendra ensuite un tournant important, Mundson disparaitra, Farell prendra la tête de ses affaires et épousera Gilda. Si Gilda croit naïvement retrouver une  relation amoureuse authentique avec Farell, Farell remet rapidement les choses au clair, nous laissant deviner une vengeance qui l'épuisera à petit feu. Farell prive Gilda de ce qu'elle aime le plus, s'amuser et séduire, celle-ci demeure alors dans une torture psychologique orchestrée par un homme sourd à ses soupirs. Gilda avouera n'avoir aimé que lui et souffrir de son indifférence et de sa cruauté, Farell ne fléchira pas, en bon borné qu'il est, n'oubliant pas au passage de la pousser avec une répulsion féroce. Il la condamne à la solitude la plus inextricable. Il la châtie en la maintenant hors du monde et de la vie, un comble pour une femme consumée par la fureur de vivre. Gilda quitte une prison pour en retrouver une autre, deux hommes, deux loufoques, un destin qui semble définitivement tourné vers le drame. Celle-ci ne se laisse cependant pas faire, et enchaînera les rencontres avec des hommes qui disparaîtrons immanquablement dans les ténèbres de la ville, éliminés par les hommes de mains de Farell. Un enchaînement de rencontres d'ailleurs remarquablement bien filmé, avec une maîtrise encore une fois d'une grande modernité, qui semble avoir inspiré ce qui succédera quelques années plus tard aux films noirs, les films de gangsters. Gilda chantera avec sensualité toujours "Amado Mio" dont les paroles font écho au film, numéro qui se clôturera par une fondue noire et élégante assombrissant peu à peu la scène. Peu de temps après apparaitra le passage mythique ou notre déesse de l'amour gantée de noir chante "Put the blame on mame":

     En chantant "Put the blame on mame" et en retirant juste un gant Rita Hayworth a réalisé le Strip Tease le plus sexy du Cinéma. Gilda, enivrée par l'alcool, meilleure amie et ennemie d'une femme seule et désaxée, s'abandonne à une danse langoureuse, se donnant en spectacle avec audace devant une foule de soupirants à en devenir, provoquant le courroux de Farell. Sa robe dévoilant une silhouette gracieuse et des épaules de toute beauté. La suggestion, une danse lascive, des courbes qui se dessinent sous le satin..et qui déclenchent la folie des hommes ! Mais l’exubérance tristement festive de celle-ci sera rapidement étouffée par la gifle tonitruante de Johnny, humiliant définitivement notre Gilda. Gilda étant pourtant décidée à assumer plus que jamais sa réputation de cajoleuse, une cajoleuse qui aime vivre vite et enchainer les aventures. C'est en cela que Rita Hayworth fait penser au personnage de Juliette dans le célèbre film de Vadim, ou a celui de Monica Bellucci dans Malena. Trop belles pour vivre libres elles doivent se résoudre au sacrifice, à la solitude, si elle veulent avoir le respect de leur entourage. Juliette comme Gilda est d'un courage déconcertant, elle ose assumer son amour des hommes dans un monde ou on se méfie comme de la peste d'une femme à la séduction trop généreuse.

    Cependant, après ce moment terrible, sous les bons conseils du policier plutôt avertit, Farell réalisera que sa haine n'est que le revers de l'amour, et qu'il est temps d'enterrer la hache de guerre. Ils se retrouverons donc, Farell aussi délicat qu'il peut l'être, rompra avec cette chape de plomb qui pèse sur leur relation depuis ce qui parait être une éternité. Il réussira ainsi à récupérer sa Vamp excédée de chagrin avant qu'elle ne file pour New York le cœur serré et l'âme en peine. Alors que nos deux héros retrouvent la raison et la possibilité de se comprendre réellement, une apparition surprenante vient tout bouleverser. Mundson est debout, droit comme un piquet, une arme à la main, glaçant le sang de l'employé philosophe et de nos deux enflammés. Mundson explique alors avec un regard d'une colère froide qu'il avait disparu pour éviter de payer le prix cher de son acte, le meurtre. Il tentera de tuer Farell du fait de son amour mortel pour Gilda, mais se fera neutraliser par l'employé, sauveteur constant du vacarme affectif de nos personnages.

    Une fin que l'on peut trouver peut être un peu incongrue, trop tiède et convenue pour un film noir. La ravissante Gilda retrouve son premier amant pourtant auparavant impossible et d'une sauvagerie ténébreuse, le méchant mégalomane est abattu par l'ange gardien de la belle. Après tant de nœuds et de complexité dans l'intrigue, on tombe sur une fin aux allures de happy end bien étrange. On éprouve tout de même de la peine pour Mundson qui malgré un caractère rigide aimait probablement sincèrement Gilda. Le visage déchirant d'effroi de Gilda quand Mundson se fait tuer reste, on ne l'oublie pas, encore une sacrée performance de l'actrice.

    De ce film on retiendra surtout une beauté affolante et affolée, une structure aux allures d'énigme, un érotisme brulant qui se cache derrière une réalisation au charme classique mais pas exempt de richesse inventive.

     Nota Bene: -J'ai l'impression que certains films du 20ème siècle de Martin Scorsese sont inspirés de certains films noirs (dans l'enchaînement des scènes, les plans, la manière de filmer,l'esthétisme parfois) ça ne serait pas étonnant vu ses influences, à demander a un expert !

    -Je suis tombée sur un bon article qui expliquait bien le rapport ambigu entre Farell et Mundson, ça m'a éclairé sur certains points, j'ignorais l'hypothèse de la canne comme signe phallique, merci donc aux cinéphiles qui partagent leurs analyses! :)

     

     

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